COURRIER

Date Lille le 15 mars 2004
Destinataire Monsieur Hervé VANLAER, Ministère de l'Ecologie et du Développement Durable

                    Monsieur le Directeur,

      Fidèle à notre méthode de travail nous avons procédé à l'analyse du document « Prescriptions à respecter pour l'agrément d'un organisme en application du décret n° 92-377 du 1er avril 1992 » comme le Ministère nous l'avait demandé.

        Vous trouverez ci-joint les différents éléments de cette analyse qui se présente sous la forme d'une analyse complète et exhaustive du texte (cliquez ici) qu'il faut prendre autant comme des remarques de fond que des remarques de forme. Ces dernières sont à considérer non comme une critique, mais à titre de contribution de relecture.

        Par ailleurs, une analyse politique du texte, au sens des espoirs que les différents acteurs du dispositif, et plus particulièrement les collectivités étaient en droit d'attendre de cette phase de renouvellement qui était l'occasion d'améliorer le dispositif, porte sur les points suivants :

       - la nature juridique des prescriptions ;
       - le respect du principe de libre administration des collectivités ;
       - l'organisation des relations entre les collectivités et les organismes agréés ;
       - la définition des missions des organismes agréés.

A/ La nature juridique des prescriptions

        La formulation utilisée et l'organisation générale du document introduit une ambiguïté sur la nature du document. Il est parfois difficile de savoir s'il s'agit d'un simple guide de rédaction ou d'un cahier des charges. Nous considérons qu'il est important que le document soit un véritable cahier des charges et qu'il s'impose aux organismes agréés. En conséquence, des formulations trop imprécises (« à titre indicatif » par exemple) devraient être évitées.

B/ Le respect du principe de libre administration des collectivités

        Plusieurs dispositions prévoient une intervention directe des organismes agréés dans la gestion et les choix des collectivités locales. Le texte envisage, par exemple, de confier aux organismes agréés une aide à la rédaction des rapports annuels du Maire, l'homogénéisation nationale des consignes de tri, le respect des objectifs de maîtrise des coûts globaux de gestion des déchets ménagers. Ces aspects relèvent directement de la compétence des collectivités et non de celle des organismes agréés. De même, l'intervention des organismes agréés dans les relations entre les collectivités et leurs prestataires de tri risque d'entacher d'illégalité les procédures de consultation. Mettre les collectivités sous la tutelle des organismes agréés déséquilibre gravement les relations contractuelles qui seront établies. De plus, il ne revient pas à un cahier des charges, sans valeur législative, de remettre en cause le principe de libre administration des collectivités locales.

C/ L'organisation des relations entre les collectivités locales et les organismes agréés

        Les pouvoirs publics admettent que les organismes agréés refusent de signer un contrat avec une collectivité locale. Le texte est muet sur les conséquences d'un tel refus et sur les mesures que les pouvoirs publics comptent prendre pour faire face à cette situation. Une telle disposition autorise, de fait, les organismes agréés à faire le tri entre les collectivités en fonction de critères qu'ils définissent eux-mêmes. De plus, le texte ne précise pas si cette facilité consentie aux organismes agréés s'appliquerait uniquement aux nouveaux contrats ou si elle concernerait également les renouvellements de contrats. Dans le dernier cas, la position des collectivités locales, qui ont déjà réalisé les investissements nécessaires, serait considérablement affaiblie dans les négociations avec les organismes agréés. Enfin, une telle possibilité remet en question l'égalité de traitement pour tous les habitants du territoire national, qui payent tous le point vert. Certains d'entre eux n'auront plus accès au financement de la collecte sélective des déchets d'emballages ménagers.

        Le texte fait apparaître une confusion entre les missions confiées aux organismes agréés et les compétences des collectivités locales. Ces dernières ont une obligation de moyens et non de résultats. Elles n'ont pas à prendre en charge la réalisation des objectifs fixés aux organismes agréés, mais à fournir aux habitants un service de proximité et à les inciter à participer à l'effort commun. La contrepartie de l'implication des collectivités et de leurs efforts de mise en place des moyens de collecte et de tri est constituée des soutiens mentionnés dans les contrats. Les soutiens n'ont donc pas à être liés à l'atteinte des PTM, mais à la mise en œuvre de moyens permettant un recyclage effectif des déchets d'emballages ménagers collectés et triés.

        Enfin, tous les soutiens ont été versés en fonction des dispositions figurant dans les agréments délivrés par les pouvoirs publics. Evoquer des soutiens non justifiés revient à jeter, sans raison, le discrédit sur les collectivités locales et la sincérité de l'ensemble du dispositif.

D/ La définition des missions confiées aux organismes agréés

        Le texte n'introduit aucune différence de niveau entre les différentes missions évoquées. Il ne précise pas que la mission essentielle des organismes agréés consiste à gérer l'aspect financier de la responsabilité des producteurs d'emballages ménagers. Les autres missions, sont donc subordonnées étroitement à la mission principale.

        Les objectifs assignés aux organismes agréés découlent d'une répartition entre le dispositif mis en place pour les déchets d'emballages ménagers et celui concernant les déchets d'emballages non ménagers. Ils sont donc déconnectés de ceux mentionnés dans la directive européenne. De plus, le respect de ces engagements est confié à l'ensemble des partenaires, sans responsabilité clairement identifiée. Il aurait été judicieux de définir des objectifs généraux attribués à chaque organisme agréé et représentant le niveau d'effort global qui lui est demandé. Les objectifs tels que mentionnés dans le texte servent essentiellement à calculer le montant du point vert et ne constituent pas un enjeu politique.

        Au global, il est regrettable de constater que ce document, qui devait théoriquement précédé la réflexion ainsi que la demande d'agrément, vient en fin de processus et, de ce fait, semble valider le projet de demande d'agrément. Nous constatons que ce document :

       - confirme les limites données aux efforts environnementaux et un coup d'arrêt à l'engagement des producteurs ;
       - laisse constamment planer la suspicion sur les compétences techniques et l'honnêteté des collectivités (optimisation des coûts confiée aux sociétés agréées ; « soutiens non justifiés ») ;
       - conforte par les missions prescrites, les sociétés agréées dans le rôle global « d'agence pour la maîtrise de la gestion des déchets » en lieu et place de l'ADEME alors qu'elles se limitent en responsabilité à 86,1 kg sur les 400 kg par an produit par habitant.

        En vous rappelant notre attachement à faire reposer le dispositif sur des engagements clairs et précis de tous les acteurs concernés, nous vous prions d'agréer, Monsieur le Directeur, l'expression de nos meilleures salutations.


Paul DEFFONTAINE
Président
Maire de Willems
Vice-Président de
Lille Métropole Communauté Urbaine


Copies :
Thierry TROUVE - Directeur de la prévention de la pollution et des risques, délégué aux risques majeurs
Mélanie MOLIN - Chargée de mission