COURRIER

Date Lille le 17 janvier 2001
Destinataire Monsieur Marc CHEVERRY, Chef du département technique des déchets, ADEME

               Monsieur,

        Pour faire suite à la dernière réunion de la commission consultative « déchets d’emballages ménagers » et en réponse à la sollicitation exprimée à cette occasion, j’ai le plaisir de vous adresser ci-après nos remarques, commentaires et suggestions relatifs à la proposition de calcul des taux de recyclage et de valorisation dans le cadre du tableau de bord des emballages ménagers.

        En préalable, je tiens à rappeler notre satisfaction quant à l’existence même de ce tableau de bord qui, comme nous le revendiquions depuis plusieurs années, facilite de beaucoup le suivi de l’activité des sociétés agréées.

        Pour nous être particulièrement investis à vos côtés dans l’élaboration de cet outil, il nous semble toujours opportun de vous faire part de quelques observations tirées de la lecture attentive de la version décembre 2000 du tableau de bord et de la note de commentaires qui l’accompagne.

        En fonction du contenu du document, nous suggérons tout d’abord d’en revoir l’appellation car il est avant tout destiné à permettre de mieux appréhender les résultats des organismes agréés au regard des missions qui leur sont assignées dans le cadre du dispositif français d’élimination des déchets d’emballages ménagers. Le titre actuel nous semble imprécis et nous proposons donc « Dispositif français d’élimination des déchets d’emballages ménagers : suivi de l’activité des organismes agréés » pour rendre explicite la vocation du document.

        Nous souhaiterions également que les présentations distinguent de manière claire les résultats avérés des estimations formulées pour les années à venir.

        De plus, dans un souci renforcé de lisibilité, il serait sans doute judicieux pour les points II à V de veiller à ce que les présentations graphiques distinguent les données affectées à chacun des organismes agréés. En effet, il n’existe à notre avis aucune justification à opérer un amalgame entre les résultats des différents organismes agréés ou approuvés indépendamment les uns des autres par les pouvoirs publics.

        En détaillant le contenu de la version présentée le 13 décembre 2000, nous remarquons que :


IV - 1 - Evolution des différents postes de dépenses en MF

    - pour 2000 et 2001, l’aide aux zones éloignées est indiquée comme étant égale à 0 alors que le dispositif ne doit être supprimé qu’au 31 décembre 2002 ;

    - comme le Cercle National du Recyclage l’avait déjà relevé, la part relative des soutiens versés aux collectivités locales est en baisse entre les années 1998 et 1999.


IV - 3 - Evolution de la valorisation énergétique

    - cet élément ne devrait pas trouver sa place au sein du chapitre consacré à l’équilibre des recettes et des dépenses ;

    - s’il est maintenu, ce tableau doit être dédoublé pour distinguer le taux de valorisation énergétique des emballages contribuants de l’indicateur de valorisation énergétique des déchets d’emballages contribuants (cf. : infra) même si ce dernier n’est constitutif d’aucune obligation à l’endroit des sociétés agréées.


V - 4 - Indicateur de valorisation des déchets d’emballages contribuants

    - la courbe qui visualise le rapport ensemble du dispositif tonnages valorisés/tonnages des déchets d’emballages contribuants n’a pas lieu d’être car cet indicateur est global alors que les objectifs fixés aux sociétés agréées le sont distinctement.


        Vous comprendrez, j’en suis sûr, que toutes nos propositions sont formulées dans le but de renforcer la cohérence et l’utilité de ce document au bénéfice de chacun des acteurs impliqués dans cette démarche partenariale.

        Une fois ces différents points exposés, je reviens à votre proposition de calcul des taux de recyclage et de valorisation présentée aux membres de la commission consultative d’agrément en décembre dernier.

        Ici encore, je voudrais d’abord souligner mon contentement à voir enfin discuter les éléments de calcul et donc d’appréciation des performances de valorisation des déchets d’emballages ménagers atteintes. Cela correspond, vous le savez, à une démarche permanente du Cercle National du Recyclage exprimée chaque année à l’occasion de notre analyse des rapports d’activité des sociétés agréées.

        Par souci de lisibilité, nos commentaires et propositions sont indiqués ci-dessous dans l’ordre chronologique de lecture de la proposition exception faite du tableau de la page 1 qui reprend les éléments discutés.

C1/ Rappel des objectifs

        La fixation d’un ou plusieurs objectifs, même si elle s’explique par la nécessité de pouvoir apprécier la réalisation de la mission confiée par l’Etat aux sociétés agréées, pose plusieurs questions qui ne trouvent pas aujourd’hui de réponse satisfaisante. Tout d’abord, c’est la reprise des taux de la directive européenne qui peut étonner car le champ d’activité actuel des sociétés agréées est limité aux seuls déchets d’emballages ménagers. C’est aussi la hauteur de l’objectif de valorisation qui peut être discuté. En effet, 75 % de valorisation des déchets d’emballages ménagers est un taux qui se rattache difficilement à la responsabilité globale de la France en matière de valorisation des déchets d’emballages (cf. : directive européenne). Par ailleurs, il semble particulièrement délicat de mettre en œuvre une procédure fiable de mesure de la réalisation des objectifs fixés et, surtout, de distinguer les responsabilités participant à l’obtention de ce résultat. Le taux de valorisation fixé comme objectif à atteindre est la traduction de l’efficacité d’un dispositif global où les responsabilités de chaque intervenant ne sont pas identifiées individuellement. Pour qu’il puisse exister un indicateur de la performance d’une société agréée, il est nécessaire d’individualiser sa fonction. A cette condition, on pourra élaborer un indicateur de performance (par exemple un ratio franc dépensé/quantité des déchets d’emballages ménagers récupérée) qui mesure l’efficacité de l’outil société agréée dans la réalisation de l’objectif français de valorisation des déchets d’emballages.

2/ Gisement des emballages contribuants

        Pour pouvoir effectuer les différents calculs permettant d’apprécier la réalisation des objectifs confiés aux sociétés agréées, il faut avant tout s’entendre sur les termes (numérateur et dénominateur) de l’opération.

        Dans tous les cas, le dénominateur se rapporte au gisement d’emballages ménagers pour lequel la société agréée assume la responsabilité d’élimination du gisement de déchets d’emballages ménagers correspondant. Il convient donc en effet de se référer aux déclarations des adhérents aux sociétés agréées.

        Attention toutefois à s’attacher à fiabiliser les sources car aujourd’hui on constate, par exemple, un écart entre le gisement théorique d’emballages ménagers contribuant à Eco-Emballages déclaré par la société agréée et le gisement d’emballages ménagers contribuant à Eco-Emballages basé sur la déclaration des adhérents.

        On notera également que des adhérents aux sociétés agréées font état de versement de contribution pour des emballages constitués d’autres matériaux que les 5 considérés dans les objectifs de la directive européenne.


3/ Calcul des taux de la directive

        Même si le mode de calcul de ces taux s’appuie sur les projets de normes existants (pr EN 13439 et 13440), le Cercle National du Recyclage persiste dans son analyse et continue à dénoncer l’incohérence d’un calcul où le numérateur désigne une quantité « d’emballages usagés collectés et fournis aux fins du recyclage » (i.e. des déchets d’emballages) et où le dénominateur quant à lui, désigne une quantité « d’emballages mis sur le marché et utilisés pour la première fois ».


        Reprenant ce mode de calcul, l’ADEME considère que les taux de valorisation sont calculés en faisant le rapport entre les tonnages de déchets d’emballages valorisés, comptés en entrée des unités de valorisation, et les tonnages d’emballages mis en marché. Le texte de la proposition précise que « l’entrée en unité de valorisation correspond aux tonnages livrés aux PTM (ou cahier des charges qualité équivalent) ».

        Cette précision est totalement inadaptée et donc inacceptable. De fait, les taux de valorisation à calculer comprennent aussi le taux de valorisation globale, valorisation énergétique y compris. Faire référence à la qualité des matériaux en entrée d’unités de valorisation est donc ici infondé. Par ailleurs, pour calculer un taux de valorisation, il n’est nul besoin de s’attacher à la qualité des matériaux entrants dans une unité de valorisation. La référence aux PTM, spécifiquement attachée à la garantie de reprise proposée par les sociétés agréées dans le cadre du dispositif français, voire à un « cahier des charges qualité équivalent » est ici particulièrement malvenue.

4/ Calcul de l’indicateur de valorisation des déchets d’emballages

        Deux précisions doivent être apportées dans le libellé du titre de ce chapitre. Il s’agit ici de considérer la valorisation des déchets d’emballages ménagers correspondant aux emballages des produits à destination des ménagers mis sur le marché par les adhérents respectifs des sociétés agréées.

        Il paraît aussi indispensable de préciser le sens attaché aux termes « indicateur » et « taux ». Le mot « indicateur » ici utilisé est à distinguer de « taux » utilisé pour les calculs selon la méthode attachée à la directive européenne. On relèvera cependant que les cahiers des charges attachés aux arrêtés d’agrément des sociétés ADELPHE et Eco-Emballages mentionnent bien un « taux de valorisation globale d’au moins 75 % des déchets d’emballages ménagers [...] ». L’usage d’un mot différent ne se justifie que par la volonté de distinguer les modes de calcul. Sans doute serait-il plus judicieux de conserver le mot « taux » pour chacun des calculs en précisant selon quelle méthode il a été effectué : ratio déchets d’emballages ménagers/emballages ménagers ou ratio déchets d’emballages ménagers/déchets d’emballages ménagers.

        Après avoir apporté ces précisions, nous réitérons la critique formulée au point précédent car le calcul du taux global de valorisation des déchets d’emballages ménagers ne peut se concevoir en se limitant aux seuls « tonnages livrés aux PTM (ou cahier des charges équivalent) » car il existe bien des valorisations matière et, à fortiori énergie, qui s’opèrent sur des tonnes livrées hors PTM.

        En page 3 de la proposition présentée un tableau précise les taux d’impuretés et d’humidité des collectes sélectives. Le texte indique que « les coefficients retenus sont de manière conventionnelle, les valeurs des PTM ». Il existe ici une confusion manifeste à rapporter les teneurs en impuretés et humidité aux valeurs des prescriptions techniques minimales. Le Cercle National du Recyclage a déjà dénoncé cette présentation car il n’existe à notre connaissance aucune corrélation, directe ou indirecte, entre les valeurs des PTM et les valeurs des taux d’impuretés et d’humidité retenues pour estimer les tonnages de déchets d’emballages ménagers issus de l’abandon des tonnages d’emballages ménagers. En effet, les quantités d’eau ou d’impuretés sont calculées à partir de résultats qualitatifs d’analyse et aussi par rapprochement des données entre gisement d’emballages et gisement de déchets d’emballages.

        Pour ces raisons, nous sommes donc farouchement opposés à ce qu’il soit fait référence aux PTM dans la présentation des taux d’impuretés et d’humidité contenus dans les déchets d’emballages ménagers.

        Pour terminer sur ce point 4, nous persistons à dénoncer la prise en compte de la gangue dans la mesure des tonnages provenant de la récupération sur mâchefers car rien d’autre que les projets de normes de calcul des taux de valorisation au niveau européen ne vient justifier cette position.

5/ La valorisation énergétique

        C’est toute tonne de déchets d’emballages ménagers valorisable énergétiquement entrant dans un incinérateur et non pas « toute tonne d’emballage valorisable énergétiquement » qui doit être prise en compte.

6/ Les tonnages de verre issus des contrats verriers

        Malgré sa demande insistante auprès des pouvoirs publics et même si cette disposition est mentionnée dans le cahier des charges attaché à l’arrêté d’agrément d’Eco-Emballages, le Cercle National du Recyclage n’a toujours pas reçu d’explications satisfaisantes quant à cette pratique qui consiste à comptabiliser dans les résultats de la société agréée les tonnages de verre valorisé issus de collectes sélectives pratiquées au sein de collectivités n’ayant aucun lien contractuel avec Eco-Emballages.

        Cette disposition a beau être « dérogatoire » et ne s’appliquer que jusqu’au 31 décembre 2002, nous ne pouvons nous satisfaire de cette absence de justification qui « dope » les résultats de valorisation atteints par Eco-Emballages de plus de 300 000 tonnes.


        Au terme de l’exposé de nos différentes observations, l’équipe permanente du Cercle National du Recyclage et moi-même restons à votre disposition pour vous apporter les compléments d’explications que vous souhaiteriez recevoir et aussi pour débattre avec vous des divers amendements suggérés.

        Je vous prie d’agréer, Monsieur, l’expression de mes meilleures salutations.




Paul DEFFONTAINE
Président