COURRIER
Date Lille le 27 avril 2007
Destinataire Monsieur Jacques PELISSARD, Président, Association des Maires de France

            Monsieur le Président, mon cher Jacques,

          Pour faire suite au courrier d’AMORCE et par mes précédents courriers que tu trouveras en copie dans lesquels je m’investissais sur l’épineuse question de la mise en place de la filière « déchets d’imprimés non sollicités », je t’avais indiqué l’entièreté de ma réflexion sur la création et le fonctionnement de la cette filière.

          Afin que les collectivités locales soient indemnisées de leurs coûts d’élimination, je t’avais prouvé la nécessité de créer une contribution amont à payer par les producteurs dont le montant serait de 150 euros par tonne. De plus, j’avais émis le souhait qu’une véritable TGAP dissuasive soit mise en œuvre pour les organismes récalcitrants à contribuer.

          C’est désormais chose faite grâce à l’article 4 de la loi de finances rectificative pour 2006. Elle a introduit 3 nouvelles dispositions dans le domaine de la TGAP sur les imprimés. Ces dispositions s'appliqueront à la taxe due en 2008, au titre des imprimés assujettis en 2007 :
− abaissement du seuil, de 2 500 kg à 500 kg, des quantités d'imprimés admises en franchise de TGAP ;
− relèvement du taux de TGAP de 0,15 euros/kg à 0,9 euros/kg.

          L’article 4 du Décret no 2006-239 du 1er mars 2006 relatif à la contribution à la collecte, à la valorisation et à l’élimination des déchets d’imprimés semblait clair :
 « − Les contributions reçues par l’organisme agréé sont reversées aux communes ou aux établissements publics de coopération intercommunale ou aux syndicats mixtes compétents qui supportent la charge de la collecte, de la valorisation ou de l’élimination des déchets, en fonction du tonnage total d’imprimés distribués sur leur territoire durant l’année, déduction faite des contributions en nature versées aux établissements. »

          Les bases étant posées, les premières dérives n’ont pas tardé à se faire ressentir : en effet, l’article 2 du décret no 2006-1766 du 23 décembre 2006 relatif au barème de la contribution prévue à l’article L. 541-10-1 du code de l’environnement et des soutiens versés aux collectivités mentionnées à ce même article et modifiant le décret no 2006-239 du 1er mars 2006 relatif à la contribution à la collecte, à la valorisation et à l’élimination des déchets d’imprimés, indique que « le soutien versé aux collectivités mentionnées à l’article 4 du décret du 1er mars 2006 susvisé est égal à :

- 65 euros par tonne de déchets d’imprimés qui font l’objet de recyclage ;
- 30 euros par tonne de déchets d’imprimés qui font l’objet de traitement thermique avec valorisation de l’énergie produite, de compostage à des fins agricoles ou de végétalisation ou de méthanisation ;
- 2 euros par tonne de déchets d’imprimés qui font l’objet d’un autre traitement. »

          Je trouve dommageable pour les collectivités locales que les soutiens qui leur sont accordés ne reflètent pas leurs coûts supportés, coûts qui sont échelonnés par l’ADEME entre 122 et 206 euros HT par tonne collectée.

          Outre la hauteur des soutiens, en contradiction avec le principe de responsabilité élargie du producteur défendu par nos deux associations, je tiens à te faire part de mon insatisfaction voire de mon indignation ainsi que de ma désapprobation quant à deux points précis concernant les modalités de calcul des soutiens aux collectivités locales.

1) A chaque type de milieu (urbain, semi-urbain, semi-rural et rural) est affecté un taux qui indique la part de déchets d’imprimés non sollicités présents dans les gisements collectés. Ces taux ne sont pas issus de données de terrains et limitent de fait, les quantités soutenues. Pourtant ces données existent. Le Cercle National du Recyclage a participé à des caractérisations qui démontrent que les taux conventionnés dans le barème sont en deçà des réalités de terrain.

2) Dans les savantes formules de calcul des soutiens à destination des collectivités locales approuvées par les pouvoirs publics lors de la demande d’agrément d’Eco-folio, un coefficient appelé taux de contribution fait son apparition. L’application de ce taux déleste les collectivités de plus de la moitié de leurs soutiens la première année. En effet, selon les prévisions d’Eco-folio, suite à ce calcul, les collectivités locales ne toucheront que 40 % des 65 euros par tonne de déchets d’imprimés recyclée en 2007, soit 26 euros par tonne recyclée. L’évolution du calcul du soutien selon ces éléments et ceux transmis par Eco-folio est la suivante :

 

2007

2008

2009

2010

2011

2012

Soutien au recyclage (€/t)

65

65

65

65

65

65

Taux de contribution (prévision Eco-folio)

40 %

50 %

65 %

75 %

80 %

80 %

Soutien aux collectivités (€/t)

26

32,5

42,25

48,75

52

52

 

          Ces deux éléments relèguent au rang d’illusion les 65 euros par tonne de déchets d’imprimés (déjà contesté initialement par AMORCE et le Cercle National du Recyclage) qui font l’objet d’un recyclage définis dans le décret et qui auguraient du démarrage rapide de la filière.

          Pour ton information un autre taux appelé « Tich » réduit aussi et de manière équivalente les autres soutiens à destination des collectivités locales.

          Je sais ton attachement au partage des coûts, cependant je doute que le partage que tu envisageais lors de tes négociations avec les entreprises distribuant des imprimés non sollicités aboutirait à faire peser plus de 80 % des coûts de la filière déchets d’imprimés sur les collectivités locales la première année.

          La mise en place de cette filière sous l’égide de l’Association des Maires de France, fait reculer le principe pollueur-payeur mis en application par la responsabilité élargie du producteur. Je sais que tel n’est pas ton souhait pour cette filière, et c’est pourquoi, les collectivités locales membres du Cercle National du Recyclage souhaitent une remise à plat complète de ce barème avec une augmentation de la contribution amont à hauteur de 150 euros par tonne et une hausse du soutien à destination des collectivités locales permettant une prise en charge intégrale de la filière par les producteurs.

          Croyant en ton implication sur l’évolution de ce dossier, et persuadé que ces dérives ne pourront être acceptées par l’Association des Maires de France, je reste à ta disposition pour envisager avec toi de nouveaux débats placés dans le respect des grands principes attachés aux déchets.

          Je te prie de croire, Monsieur le Président, Mon cher Jacques, en l’expression de mes meilleures salutations. 

 

Paul DEFFONTAINE
Président
Maire de Willems
Vice-Président de
Lille Métropole Communauté Urbaine