COURRIER

Date Lille le 28 juillet 2000
Destinataire Monsieur Alain STREBELLE, ministère de l'Aménagement du Territoire et de l'Environnement

                Monsieur le Directeur,

        Pour faire suite à notre rencontre du 19 courant et en fonction de la qualité de nos échanges, je tiens tout d'abord à vous exprimer mes remerciements pour votre accueil et votre disponibilité.

        Afin de compléter les propos tenus à cette occasion, je souhaite vous apporter quelques compléments concernant la rédaction actuelle du CPD qui, à nos yeux, n'est toujours pas satisfaisante sur les points suivants :

a/ livraison de matériaux hors garantie de reprise

Deux simples rappels au préalable :

  • de 1993 à 1996, les collectivités locales pouvaient livrer des « matériaux triés » aux repreneurs choisis et bénéficier de l'entièreté du soutien à la seule condition d'un recyclage avéré ;


  • la réalisation des PTM est la contrepartie librement acceptée par les collectivités qui désirent bénéficier de la garantie de reprise des tonnes triées. En dehors de cet accord contractuel, rien n'oblige les collectivités à produire des matériaux respectant les cahiers des charges spécifiques aux filières de reprise Eco-Emballages.

        Une fois ces précisions données et en se basant sur le cahier des charges attaché à l'arrêté d'agrément de la société Eco-Emballages, nous considérons bien qu'il n'existe aucune obligation pour la collectivité à produire des matériaux aux PTM si elle ne juge pas nécessaire de recourir à la garantie de reprise. Comment alors se satisfaire d'une rédaction du CPD qui présente constamment le tri conforme aux PTM comme la voie « normale » et ce, même lorsque la collectivité n'opte pas pour la garantie de reprise ?

        Le Cercle National du Recyclage persiste dans sa dénonciation des entraves faites au développement de la valorisation matière au prétexte de difficultés d'écoulement des matériaux récupérés. Le détail de la rédaction du contrat est sur ce point particulièrement éclairant :

article 4.2 : matériau repris par un repreneur choisi par la collectivité : cas général

        La mention de l'obligation pour la collectivité de respecter les PTM alors même qu'elle a choisi de ne pas bénéficier de la garantie de reprise est inacceptable. Quand bien même existe-t-il des clauses dérogatoires précisées à l'article 4.3, c'est l'obligation pour la collectivité de fournir des tonnes triées aux PTM qui apparaît comme la voie « normale ». C'est en complète contradiction avec le cahier des charges qui indique simplement une possibilité de versement d'un soutien différencié en cas de reprise par une repreneur choisi.

article 4.3 : voies innovantes et voies nouvelles de recyclage

        Malgré les possibilités mentionnées à cet article, l'émergence de nouvelles solutions de recyclage pouvant bénéficier d'un soutien reste subordonnée à l'acceptation préalable d'Eco-Emballages. Il est ici très surprenant de s'apercevoir que cette condition préalable apparaît dans le cahier des charges attaché à l'arrêté d'agrément sans que rien ne vienne le justifier.

article 5.1 : régime général

        Ici encore, il subsiste une opposition marquée entre le libellé de cet article et la rédaction du cahier des charges car ce dernier précise que « le titulaire peut, [...], apporter un soutien financier à la tonne triée, lorsque les termes respectent les PTM ou un soutien différencié, dans le cas des solutions alternatives de recyclage, [...] ». De plus, si « tonnes triées » d'après le glossaire (article I du CPD) désignent des matériaux conformes aux PTM, pourquoi préciser à l'article 5.1 que les tonnes triées doivent être conformes aux PTM si ce n'est pour faire perdurer l'ambiguïté d'une pseudo-obligation à atteindre les PTM pour pouvoir prétendre au versement d'une soutien ?

article 5.2 : période transitoire

        Contrairement à votre réponse par courrier en date du 14 février 2000, rien n'indique ici que l'on se situe dans le cadre d'un CPD avec garantie de reprise. Cet article peut surtout être interprété (malgré l'ajout à l'article 2 - Objet) comme une obligation pour la collectivité de tout mettre en Suvre pour « réussir » à atteindre les PTM. Seul l'article 5.3. précise que ces dispositions s'appliquent uniquement en garantie de reprise.

annexe A2 :

        La présentation même de cette annexe démontre de manière flagrante la volonté de faire des PTM une condition sine qua non du versement des soutiens voire de l'établissement du CPD même hors garantie de reprise. Si les PTM ne s'imposent pas aux collectivités locales, ces dernières ont bien la possibilité de transmettre à la société agréée les cahiers des charges établis avec les repreneur choisis. La référence aux PTM et même aux STM en cas d'application du 4.3, n'a pas à apparaître car d'après le cahier des charges « lorsque la collectivité locale n'opte pas pour la garantie de reprise [...] le contrat prévoit : [...] : qu'elle s'assure que les repreneurs valorisent effectivement les tonnes collectées et triées [...]. Seul le certificat de valorisation doit être produit.


        Pour conclure sur ce point, je m'appuierai sur votre récente confirmation du caractère non-réglementaire des PTM à l'endroit des collectivités locales. Il est donc tout à fait légitime de considérer que les collectivités locales, au cas où elles n'optent pas pour la garantie de reprise, peuvent totalement s'affranchir des PTM. Dans ce cas, l'article 4.3 du CPD est sans objet et si les collectivités locales attestent d'un recyclage effectif, elles ont droit au versement d'un soutien.

        En résumé, le Cercle National du Recyclage estime qu'il y a lieu d'opérer un rééquilibrage de la présentation du CPD qui, sans être totalement en contradiction avec le cahier des charges attaché à l'agrément, est surtout critiquable dans sa propension à présenter les PTM comme passage obligé pour les collectivités locales désireuses de percevoir les soutiens de la collecte sélective et au tri des déchets d'emballages ménagers.


b/ soutien différencié

        Après vous avoir exposé oralement les raisons qui nous poussent à considérer le principe même du soutien différencié comme un dévoiement du dispositif et entendu votre réponse, nous demeurons inquiets concernant d'éventuelles modalités pratiques d'application.

        En effet, si la somme versée par la société agréée correspond à la traduction financière de la responsabilité de celui qui met le produit emballé sur le marché et est destinée à aider la collectivité à mettre en place la collecte sélective et le tri des DEM, le soutien ne saurait varier en fonction de l'atteinte d'un niveau de qualité spécifique. Le soutien n'est pas la rémunération d'une prestation effectuée par la collectivité.

        Je vous transmets ci-joint les résultats des simulations effectuées par SOFRES SA qui ont prévalu à la « différenciation » du soutien proposé au SICTOMME de Molsheim (cf. : convention voie nouvelle). Vous constaterez avec nous que la réfaction du soutien est basée sur le constat d'un coût de mobilisation des déchets d'emballages ménagers papiers-cartons moins élevé que le coût moyen calculé à l'occasion de la rénovation du barème aval. Le raisonnement qui s'applique n'a rien à voir avec la traduction financière d'une responsabilité mais bien avec la volonté de toujours payer à la collectivité une part constante du coût constaté de préparation des matériaux. Je rappelle que, dès 1998, notre association s'est opposée à l'exploitation des résultats de l'étude ADEME/AMF relative aux coûts de gestion des déchets municipaux pour la rénovation des barèmes de soutien des sociétés agréées (cf. : communiqué du 19 novembre 1998) car il s'agissait déjà de l'illustration flagrante d'une conception du barème aval basée sur la notion de remboursement partiel du coût supporté par la collectivité. Ajoutons que dans le cas du SICTOMME de Molsheim, ce n'est pas la crainte de voir les recettes dépasser les charges qui a déterminé l'application de soutien différencié car nous sommes encore loin de la totale prise en charge du coût d'élimination des DEM papiers-cartons. Si dans le principe nous partageons votre souci de plafonner les versements des société agréées à 100 % du coût supporté par la collectivité, encore faut-il s'entendre sur les éléments de calcul de ce coût.


        Dans l'optique des réflexions attendues au sein du comité des pouvoirs publics sur ce sujet, je vous propose de vous faire bénéficier de l'expertise duCercle National du Recyclage en intégrant notre association aux travaux et discussions à venir. Par ailleurs, nous sollicitons une information régulière des membres du comité de concertation collectivités locales/Eco-Emballages au sujet des règles à observer dans l'application éventuelle du soutien différencié.

        Je reste, avec toute l'équipe permanente du Cercle National du Recyclage, à votre disposition pour vous apporter les compléments d'informations que vous souhaiteriez recevoir.

        Certain de votre aimable attention, je vous prie d'agréer, Monsieur le Directeur, avec mes remerciements renouvelés, l'expression de mes sincères salutations.




Paul DEFFONTAINE
Président